Bruits de bottes à Hararé. Que se passe-t-il au Zimbabwe ?

C’est la confusion au Zimbabwe. Si on ne parle pas de coup d’Etat, l’armée a pris le contrôle de tous les endroits stratégiques de la capitale. La situation est calme et certains zimbabwéen sont allés travailler. Ils sont tellement fatigués de ce pouvoir autocratique au long règne (40 ans), qu’ils sont prêts à tout changement, y compris une prise de pouvoir par l’armée.
Oui, tous les signes indiquent qu’il s’agit bel et bien d’un coup d’Etat, mais l’armée rétorque le contraire. Ambiance très tendue donc. « Nous visons uniquement des criminels, dans l’entourage du président Mugabe, qui ont conduit le pays à la ruine. Dès que nous aurons achevé notre mission, la situation reviendra à la normale », a indiqué un porte-parole de l’armée.
Lire aussi : Ouganda : Coups de poings à l’Assemblée Nationale !

Le vice-président zimbabwéen limogé, Emmerson Mnangagwa
L’Afrique du Sud, qui met en garde contre tout changement anti constitutionnel, suit de très près l’évolution de la situation au Zimbabwe et vient de dépêcher, au nom de la SADEC, 2 émissaires à Harare, pour aider à résoudre la crise de manière pacifique. Jacob Zuma a eu un entretien téléphonique avec Robert Mugabe, qui a indiqué qu’il était en résidence surveillée.
La brusque accélération des événements à Harare est en réalité une demi-surprise. On se souvient de la sortie médiatique du général Constantino Chiwenga, chef de l’armée du Zimbabwe, le lundi 13 novembre 2017, suite au limogeage du Vice-Président Emmerson Mnangagwa, longtemps pressenti comme dauphin du président Robert Mugabe. Il dénonçait l’humiliation et l’éviction du Vice-Président du pays, suite à un bras de fer avec Grace Mugabe (la première Dame) et prévenait que l’armée pourrait « intervenir » si cette « purge » ne cessait pas au sein de la ZANU PF. Il y a six mois, l’ancienne vice-présidente Joice Mujuru a été démise de ses fonctions.

L’armée a pris le contrôle de tous les points stratégiques de la capitale
Faut-il y voir la main du Vice-Président récemment démis de ses fonctions ? On pourrait répondre par l’affirmative, puisqu’il a pu quitter sans problème le pays, pour se réfugier en Afrique du Sud, malgré les consignes fermes qui avaient été données à l’armée de n’autoriser aucune sortie du territoire. Il est reconnu comme un héros de la guerre de libération et dispose de puissants soutiens au sein de l’armée. Eu égard à l’accélération des événements, il serait d’ailleurs sur le chemin du retour.
Ce qui arrive au Zimbabwe est la conséquence de la guerre de succession du vieil autocrate (93 ans) entre la faction des Lacoste (vétérans de la guerre de libération) et celle de la Génération 40, incarnée par la très controversée Grace Mugabe, épouse du président de la république. Grace Mugabe, qui se rêve en présidente, n’en est pas une frasque près. Elle est connue pour ses accès de colère. On se souvient de son dernier voyage en Afrique, où elle était pour soigner un mal de pied. Pendant ce séjour touristique médical, elle a copieusement bastonné un top model sud-africain de 20 ans, en l’occurrence Mlle Gabriella Engels. Reprochant à cette dernière d’entretenir des relations coupables avec un de ses fils qui était dans la chambre attenante à la sienne. Malgré la plainte déposée par le mannequin et les associations de défenses des droits humains, Grace Mugabe a pu quitter l’Afrique du Sud sans être inquiétée.
Lire aussi : Kenya : La commissaire de l’IEBC, Roselyn Akombe, démissionne et part en exil
Nous allons, pour une fois, nous réjouir de l’intervention de l’armée du Zimbabwe, qui vient de prendre l’heureuse initiative de sortir son pays de l’impasse dans laquelle Robert Mugabe et son clan l’ont conduit… conséquence inévitable des longs règnes. Grace Mugabe, omnibulée par la survie de son clan, après la mort de son mari, va ainsi tout perdre… en voulant tout gagner. C’est ce qui arrive, lorsque qu’on veut pousser son avantage trop loin. Et nous doutons fort que les zimbabwéen pleurent pour son sort.

Le sulfureux couple Grace et Robert Mugabe, qui considèrent le Zimbabwe comme leur propriété privée
Que dire du Sieur Jacob Zuma, Fidèle soutien de Robert Mugabe, qui bombe le torse en se déclarant hostile à tout changement de régime «inconstitutionnel» chez son voisin ? Il ferait bien de s’occuper de toutes les casseroles qu’il traine et qui font beaucoup de bruits.
#Zimbabwe Military now in charge, say they are targeting criminals around Mugabe but Mugabe and family are safe. pic.twitter.com/bbuXxRkUB5
— Dewa Mavhinga (@dewamavhinga) 15 novembre 2017
On attend les grands donneurs de leçons et « défenseurs » de la démocratie de l’Union Africaine au tournant. Eux qui ont laissé Robert Mugabe et son clan piller et ruiner ce pays au potentiel énorme. On se souvient comment ils avaient tenté de parasiter la dynamique née de l’insurrection qui a chassé Blaise Compaoré du pouvoir, après 27 ans de règne absolu. Heureusement que les Burkinabè ont été vigilants. Au Togo ça bouge et c’est tant mieux… Les peuples sont désormais affranchis. Et c’est un processus irréversible.
Origène Kolinka