Processeurs : la Chine de plus en plus indépendante des Etats-Unis
Pékin va investir 30 Md$ dans la construction d’une nouvelle usine de fabrication de semi-conducteurs. Pour ses supercalculateurs, la Chine cherche de plus en plus à se passer des technologies américaines.
La Chine muscle sa capacité de production de semi-conducteurs. Engagé dans une bataille diplomatique avec les Etats-Unis sur le sujet, l’Empire du Milieu est en passe de se doter d’une nouvelle usine capable, dans un premier temps, de graver des composants Flash 3D Nand et des DRam. Cet investissement de 30 milliards de dollars au total sera effectué par Tsinghua Unigroup, dont l’actionnaire majoritaire (Tsinghua Holdings) est contrôlé par l’Etat chinois.
Vers l’exaflops avec des coprocesseurs locaux
La construction de cette unité de production s’inscrit dans la stratégie d’indépendance technologique que poursuit Pékin. En 2014, Pékin annonçait vouloir investir 150 Md$ sur 10 ans dans les semi-conducteurs. Objectif de ce plan : voir 70 % des terminaux employés dans le pays fonctionner avec des processeurs locaux en 2025.
Si les supercalculateurs chinois font aujourd’hui jeu égal avec leurs homologues américains, la plupart d’entre eux restent construits sur la base de processeurs fournis par des industriels occidentaux. Sauf que le dernier fleuron du HPC chinois, le Sunway TaihuLight (en photo) – le supercalculateur le plus véloce du moment selon le classement Top 500 (avec 125 petaflops de puissance maximale) -, repose sur un processeur chinois, le ShenWei, et des technologies d’interconnexion locales. Là où le précédent porte-étendard chinois, le Tianhe-2, avait recours aux Xeon de l’Américain Intel.
Signalons que, selon l’agence de presse chinoise Xinhua, Pékin s’est lancé dans le développement d’un prototype de supercalculateur exascale (dépassant l’exaflops, soit 1000 petaflops). Ce dernier serait une évolution du Tianhe-2, le second système le plus puissant au monde actuellement (avec 55 teraflops de puissance maximale). Si ce supercalculateur intègre aujourd’hui des coprocesseurs Xeon Phi d’Intel, son évolution – baptisée Tianhe-2A – reposerait, elle, sur des puces chinoises, en raison de l’embargo décidé par Washington sur les technologies de pointe. Selon le site Top500.org, le coprocesseur employé par le futur Tianhe-2A serait appelé Matrix2000 GPDSP, un modèle délivrant une puissance proche des Xeon Phi de génération Knights Landing. Le futur supercalculateur continuerait toutefois à employer des puces Intel comme processeurs principaux (des Xeon E5 en l’occurrence).
Que va décider Trump ?
La Chine et les Etats-Unis sont engagés dans une course de vitesse pour produire les premiers systèmes exaflopiques, l’Union européenne et le Japon faisant figure d’outsiders dans cette compétition. Washington multiplie les signes de nervosité face à la montée en puissance de son rival asiatique. En début d’année, un groupe de travail de la Maison Blanche accusait Pékin de truquer le marché des semi-conducteurs, en réduisant artificiellement les prix. Et recommandait à l’administration de renforcer ses investissements en R&D et de développer de nouvelles génération d’ordinateurs (quantiques ou neuromorphiques) afin de distancer la Chine.
Pour l’instant, la nouvelle administration Trump n’a pas encore pris de position officielle quant à la construction du premier système exaflopique des Etats-Unis, qui devrait être hébergé par le département de l’Énergie. La presse américaine fait toutefois état d’une possible accélération du calendrier pour livrer ce système dès 2021, contre 2023 précédemment. La Chine et le Japon ont annoncé leur intention de franchir ce jalon dès 2020, l’Europe comptant y parvenir en 2022 très certainement sur la base de technologies ARM.
silicon.fr
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