Cuba : Voici le mystérieux son qui a retourné le cerveau des diplomates américains
A Cuba, entre la période fin 2016 et début 2017, plusieurs diplomates américains se sont plaints de «divers symptômes physiques», dont des pertes d’audition. Associated Press a mis la main sur un enregistrement de la fréquence sonore qui avait causé le départ de vingt et un employés de l’ambassade des Etats-Unis à La Havane pour cause de malaises.
L’affaire, digne d’un roman d’espionnage, avait fait grand bruit fin septembre dernier. Washington avait dû rapatrier d’urgence vingt et un diplomates en poste à la Havane, soit la moitié du personnel de l’ambassade, en raison d’un phénomène mystérieux qui avait causé maux de têtes, étourdissements et autres nausées à une partie des personnels américains en place dans la capitale cubaine. Et selon les témoignages, il ne s’agissait pas d’une gêne anodine : d’après le Département d’Etat US, « Ces employés ont subi des lésions importantes », notamment des pertes d’audition, des vertiges, des maux de tête ainsi que des problèmes cognitifs, d’équilibre ou de sommeil, comme le rapportait Le Monde dans son édition du 29 septembre.
Ces « attaques », qui n’étaient pas seulement localisées dans les résidences des diplomates, mais également dans des hôtels fréquentés par des américains, et qui visaient aussi des citoyens canadiens, étaient d’une origine inconnue, bien qu’un fort soupçon de diffusion d’ultrasons planait déjà lors des premières investigations.
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Des ultrasons pour chasser l’américain
Le mystère semble levé aujourd’hui, et l’hypothèse de « l’arme sonique » (ou sonore) semble se confirmer. Associated Press a obtenu et diffusé le fameux son qui aurait créé tant de dégâts chez les diplomates en poste à Cuba. Cet enregistrement provient de personnes en place ayant entendu ce truc bizarre et ayant eu le réflexe de l’enregistrer. Ces derniers décrivent une gamme de sons différents, comme des bruits de grincement aux bruits qui ne pouvaient être entendus qu’à certains endroits. Les témoins ont toutefois rapporté un son commun : un bruit intense, aigu, qu’Associated Press décrit comme « comme une masse de grillons » ou un gémissement qui « semble onduler, voire s’écrouler » et rappelle les clous sur un tableau noir. Au cas où cela vous parlerait, le son est situé entre 7 000 et 8 000 kHz sur une échelle audio et comporte environ vingt fréquences.
Voici le fameux son.
Si vous voulez vivre ce qu’ont vécu les diplomates US à partir de fin 2016, selon toute vraisemblance, il suffirait de le faire tourner en boucle jour et nuit chez vous et au bureau pendant quelques jours. C’est une méthode déjà connue pour éloigner les rongeurs, et qui permettrait donc également de bouter l’américain. Rappelons cependant que les américains ne sont pas en reste pour ennuyer les méchants avec du gros son puisqu’il se raconte qu’à Guantanamo, l’une des méthodes les plus prisées pour faire craquer les détenus consistait à leur vriller les tympans avec du hard rock made in USA poussé à fond toute la journée.
Il s’agit probablement d’un nouvel épisode dans la saga espionnage contre espionnage entre ces deux pays. Un cap serait cependant franchi si les faits sont avérés, nuance James Cason, le responsable dans les années 2000 de la Section des intérêts américains (USINT) – la cellule diplomatique qui fonctionnait via la représentation suisse à Cuba. «On pouvait entrer chez vous et effacer les photos de vos enfants sur votre ordinateur, ou retourner les livres sur votre table de chevet, juste pour montrer que vous n’aviez aucune intimité. Mais il ne s’en sont jamais pris physiquement à quelqu’un», explique James Cason.
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On pourrait supposer également que ces attaques acoustiques résulteraient d’un «essai de surveillance qui a mal tourné». Voilà en tout cas une affaire susceptible d’envenimer les relations entre les Etats-Unis et Cuba, rétablies en 2015 avec Barack Obama après un demi-siècle de rupture mais qui se sont à nouveau dégradées avec l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche.
Il se trouve que gouvernement canadien est également concerné. Il a évoqué la perte d’audition d’un de ses diplomates en poste à La Havane. Pour rappel, le Canada avait joué de ses relations avec le régime de Raul Castro pour faciliter le dégel entre Cuba et les Etats-Unis annoncé en décembre 2014.
Origène Kolinka