Bienvenue dans l’ère de l’haptique : les pantalons de yoga et les chaussures intelligentes, c’est pour bientôt
Initialement utilisée dans les téléphones portables pour les faire vibrer en cas de réception d’un message ou d’un appel, la recherche sur la technologie haptique a bien progressé. Elle concerne avant tout la sensation du toucher. Aujourd’hui, de nouveaux champs d’applications sont développés. Des loisirs, au sport au passant par la médecine, l’innovation est en phase de devenir une révolution.
La technologie haptique, au départ, c’était le vibreur des téléphones portables quand ils étaient en mode silencieux pour ne pas déranger. Pour tous ceux qui ne connaissent pas, en quoi consiste la technologie haptique ? Quelle est son application actuelle ?
Abderrahmane Kheddar : Au départ, c’était surtout les dispositifs robotiques à retour d’effort utilisés pour contrôler les robots à distance dans les sites nucléaires. En France les pionniers de la téléopération sont Jean Vertut et Philippe Coiffet, j’étais l’étudiant de Coiffet, et j’ai introduit l’haptique en réalité virtuelle). A la base de la technologie haptique, c’est donc les bras robotiques à retour d’effort utilisés en couplage bilatérale pour le contrôle à distance d’un autre robot (similaire que le bras) pour faire des tâches dans des environnements hostiles à l’homme (les sites nucléaires).
Il y en a beaucoup trop pour les dénombrer toutes. Pour faire simple, le rendu haptique est une extension naturelle des technologies de l’information et de la communication : on échange des images, du son, même de l’odorat, et l’haptique permet simplement de rendre des informations perceptibles par le sens du touché et kinesthésique. Vous avez cité les vibreurs téléphoniques comme exemple.
Des débouchés existent pour cette technologie dans la médecine notamment. Quels progrès pourra-t-on réaliser dans le champ médical avec cette technologie ?
Dans la médecine, le rendu haptique fait déjà partie des simulateurs chirurgicaux, notamment ceux qui simulent la chirurgie minimalement invasive effectuée par des robots contrôlés à distance par des chirurgiens. Elle permet donc l’apprentissage des chirurgiens en diminuant, voir éliminant, l’usage de cadavres. Elle permet aussi aux chirurgiens de se rendre compte des interactions en opérations directe sur le patient en lui permettant de ressentir l’interaction de l’outil avec les organes internes. Pour l’instant, les robots chirurgicaux comme le système Da Vinci ou Zeus ne disposent pas de possibilité de faire ressentir aux chirurgiens les forces d’interaction entre son outil (porté par le robot) et le syntaxeur (joystick) qu’il utilise pour le contrôler. Les forces d’interactions sont devinées ou induites grâce à la déformation des organes, cela s’avère insuffisant dans beaucoup de cas. Un des challenges liés à l’haptique et la restitution des sensations de touché aux prothèses de main par exemple et de doter les outils de la chirurgie invasive de capteurs à même de mesurer l’interaction entre outil et organes et la restituer au chirurgien.
Il semble que désormais, la technologie haptique nous permette de recevoir des indications sur nos vêtements. Par exemple, un pantalon de yoga vibrerait si la position tenue par une personne est bonne ou non et permettrait de la corriger. Des semelles vibreraient de manière à indiquer la bonne direction à suivre pour des touristes qui visiteraient une ville. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur cette application ?
Les dispositifs vibrotactiles portables (comme partie de l’habillement ou des dispositifs de contrôle) sont une technologie ancienne utilisée par les pilotes de chasse (dans le militaire donc) pour aider au guidage et au pointage (aide au pilotage ou au combat de l’air). Elle s’est étendue dans l’armement marin et terrien pour transmettre des informations de direction ou autre de manière furtive. Elle s’est ensuite popularisée dans le civil pour diverses applications de rendus haptiques pour le guidage, l’apprentissage ou la transmission d’information en équipant directement des habilles communicants (smart wearing) ou les dispositifs tels que les montres ou les smart phones.